À partir de la puberté, tous les musulmans doivent pratiquer le jeûne. À une exception près, le malade et les personnes âgées fragiles sont exemptés. Toutefois, malgré leur âge avancé et leur faiblesse à cause des maladies, nombreux sont ceux qui s’obstinent à jeuner.

Les personnes âgées sont généralement fragiles, avec une santé bien souvent changeante et réduite, expliquent les spécialistes. Il ne leur est habituellement pas recommandé de jeuner. Par ailleurs, pour cette année, la consigne est d’autant plus valable que ramadan se déroule en plein mois de juillet. Étant donc accompagné de forte chaleur, ce mois saint peut affaiblir davantage leur organisme, déjà fragilisé, et aggraver d’autant plus leur état de santé.

Pour le Dr Amine Joundy, médecin généraliste, «les risques qu’encourt une personne âgée à jeûner alors qu’elle est malade dépendent tout d’abord de la maladie en cause». Cependant, les trois principaux dangers selon le Dr Joundy sont les suivants :
1. L’augmentation du risque de complications aigües du diabète que ce soit en cas d’arrêt du traitement, ce qui entraîne une hyperglycémie pouvant aller jusqu’au coma, ou au contraire en cas de maintient du traitement par insuline sans alimentation en parallèle, ce qui provoque des hypoglycémies parfois très sévères.
2. L’augmentation du risque de complication d’ulcère gastroduodénal (perforation, hémorragie) en raison d’une production plus importante d’acidité gastrique par le corps
3. L’augmentation du risque de calcul de la vésicule biliaire.

Les facteurs de risque

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il n’y a pas d’âge précis au-delà duquel le jeûne deviendrait risqué, révèle le Dr Joundy. «En théorie, une personne âgée en bonne santé n’est pas plus exposée à tomber malade à cause du jeûne pendant le mois du ramadan», explique le médecin généraliste. Toutefois, «en pratique, il est préférable de consulter un médecin qui procèdera au dépistage d’un éventuel problème de santé qui pourrait être aggravé par le jeûne et qui conseillera chaque personne au cas par cas», confie-t-il. D’autre part, pour ce qui est de la période de l’année la plus risquée, il s’agit évidemment de l’été, car la chaleur associée au jeûne augmente le risque de déshydratation, et ceci est d’autant plus marqué chez les personnes âgées, avec des conséquences qui peuvent être graves voire fatales, avoue le Dr Amine Joundy. Néanmoins, malgré les risques, la chaleur et le manque, nombreuses sont les personnes âgées qui s’obstinent tout de même à jeûner. Le médecin généraliste leur conseille alors tout d’abord de s’hydrater. Ainsi, ces personnes doivent boire suffisamment après la rupture du jeûne.

Ensuite, les personnes qui jeûnent, qu’elles soient âgées ou pas, ne doivent pas déséquilibrer leur alimentation par des repas trop copieux, trop sucrés, trop gras afin de compenser ce qu’ils n’ont pas mangé durant la journée. Le prétexte que le ramadan est une période exceptionnelle de l’année durant laquelle ils peuvent se permettre quelques écarts ne fonctionne pas non plus, souligne le spécialiste. Pour le cas particulier du ramadan, il faut aussi prendre en considération les perturbations induites, non pas par le jeûne lui-même, mais par le changement de la façon de manger, explique le médecin Joundy. Par exemple les patients qui sont soumis à un régime spécial (peu salé comme les hypertendus ou sans sel comme les patients sous traitement corticoïdes, ou sans sucre comme les diabétiques) ont parfois tendance à ne plus respecter leur régime, ce qui entraîne un déséquilibre de leur maladie qui était stable jusque-là avec pour conséquences des complications aigües parfois gravissimes comme un coma acidocétosique ou hyperosmolaire chez le diabétique par exemple.


Les maladies à risque

Pour le Dr Joundy, il y a plusieurs maladies face auxquelles une personne âgée ne doit pas jeûner. On en distingue six :
1. Le diabète interdit le jeûne dans certains cas qui ont été précisés lors de la conférence de consensus de janvier 1995 à Casablanca. On en compte sept, dont le diabète de type 1 (c’est-à-dire apparu à un âge jeune et nécessitant généralement le traitement par injection d’insuline), le diabète de type 2 non équilibré (soit celui apparu à un âge avancé et généralement traité par des médicaments par voie orale), les complications aigües du diabète comme l’état d’acidocétose, le diabète présentant une complication chronique dégénérative (atteignant la rétine, les reins…), le diabète chez la femme enceinte, chez la femme allaitant son enfant et chez la personne âgée quel que soit son type.
2. Les gastrites et surtout les ulcères gastroduodénaux notamment si le patient n’est pas traité.
3. Les troubles du comportement alimentaire comme l’anorexie, la boulimie…
4. Les personnes en état de malnutrition ou de dénutrition, quelle qu’en soit la cause.
5. Les personnes souffrant d’hypoglycémies avérées (médicalement confirmées)
6. Les personnes dans un état de santé critique (par exemple l’infection aigüe sévère, des hémorragies importantes…)

Repères
  • D’après la religion, les personnes âgées peuvent être exemptées de jeûner pendant le ramadan.
  • Sous certaines conditions, la personne âgée, dont l’âge est très avancé, qui ne peut plus jeûner au mois du ramadan (qui ne peut pas rattraper les jeûnes qu’il a ratés) et le malade incurable, ne jeûnent pas.
  • La personne âgée qui n’est pas capable de jeûner, si elle est riche, doit donner de l’aumône à un pauvre pour chaque jour de jeûne. Le Marocain modeste n’en donne pas, mais doit faire des invocations.

 

Publié le : 22 Juillet 2013 – Lamiaâ Khalloufi, LE MATIN